Livraison gratuite en France métropolitaine !!! (hors livres)

Antoine GRANDIN

Aux tréfonds de la forêt d’Artrea, un petit village avait pris vie. Une vingtaine de maisons tenaient compagnie à un vieux moulin à eau, plongé dans la belle et tumultueuse rivière d’Anatem. Perdu au fond des bois, les villageois vivaient principalement du bucheronnage et de quelques cultures à sept kilomètres de là. Les champs de blé et les vingt et un potagers servaient plus à nourrir les habitants qu’à engranger suffisamment pour des échanges avec les villages alentour. Bien qu’ils ne soient pas riches, les villageois pouvaient jouir des fruits de la forêt et de l’abondance apportée par l’Anatem. C’est d’ailleurs auprès de cette dernière que Galaten aimait paresser.

C’était un bel été, les jours étaient chauds et la pluie n’apparaissait que tardivement dans la nuit. Un seul orage avait éclaté, mais cela n’avait pas empêché Galaten de dormir, car le lendemain promettait d’être un beau jour. Cela faisait huit jours qu’il avait fait sa part aux champs, il était libre pour la journée entière et comptait bien en profiter. Il s’était levé une bonne heure avant l’aurore, quittant son logis comme un voleur à pas de loup. Il ne réveilla ni ses parents ni sa jeune sœur qui ronflait plus bruyamment que tous les hommes de ce village réunis. Un véritable petit cochon ! Riant intérieurement, il fila vers la remise où ses affaires l’attendaient déjà. Sans avoir besoin de ses yeux, il s’empara de sa sacoche et d’une canne à pêche en bois de frêne qui avait été façonnée par son grand-père des décennies plus tôt. En posant ses doigts sur le bois, il se sentit ragaillardi et sut que sa journée serait forcément poissonneuse.

Il ne partit pas aussitôt en direction de la rivière. Il fila vers le nord où les rochers étaient colossaux et les arbres plus vieux que le village lui-même. Il marcha jusqu’à l’aube avant d’atteindre la pierre Farry. Il était fier de ce nom, car c’était lui qui l’avait trouvé en observant longuement ce repère menant à son coin de pêche favori. Elle ressemblait, trait pour trait, au vieux meunier, jusque dans le lierre mimant ses poils de nez et d’oreilles. Évidemment qu’il lui avait donné son nom !

Prenant la direction de la rivière, il sauta un tronc croulant sous les champignons et suivit le sentier que ses nombreux allers-retours avaient tracé dans les herbes, les ronces et les fougères. Il se dirigeait au doux clapotement de l’eau sur les rochers, ainsi qu’au chant mélodieux des oiseaux venant faire un brin de toilette ou quêtant quelques vies aquatiques dont ils feraient bien leur repas. Son cœur se mit à battre plus fort et un sourire étira ses lèvres alors qu’il entrevoyait déjà les plaisirs d’une bonne pêche où il pourrait se plonger dans son esprit fertile en s’imaginant vivre de merveilleuses aventures. Il ne lui restait plus qu’à passer par la crevasse aux parois abruptes qui dissimulait cette portion de la rivière. C’était son grand-père qui lui avait montré le chemin de ce havre de paix. L’entrée était juste devant lui et son regard se glaça. Un amas de roche et de bois bloquait le passage.  Il en lâcha presque sa sacoche. Attristé plus qu’énervé, il fonça sur l’obstacle pour trouver un moyen de le passer. Rien, il ne pouvait rien faire… Les pierres étaient trop lourdes pour être retirées et escalader serait trop dangereux. Le bois et la mousse qui recouvraient les pierres étaient humides, s’il glissait il se briserait la nuque. Maudit orage ! brailla-t-il en reculant.

Son grand-père lui avait toujours appris à ne pas baisser les bras. Il trouverait un nouveau chemin ou un meilleur coin, voilà tout. Jetant son regard des deux côtés de la crevasse, il choisit de partir vers la droite, remontant ainsi la rivière vers le nord. Il suivit les parois ruisselantes pendant ce qui lui parut être une heure avant qu’une nouvelle voie ne s’offre à lui. Un passage traversait la roche. Jetant un coup d’œil à l’intérieur, il vit le soleil briller d’un éclat décuplé de l’autre côté. S’engouffrant, il traversa en quelques instants les ténèbres qui le séparaient de sa rivière adorée. En arrivant de l’autre côté, son regard se posa sur l’eau limpide où une truite de la taille de son avant-bras venait de gober une mouche. Il faillit se précipiter au bord de l’eau, au risque d’effrayer le poisson. Posant sa canne contre la paroi mousseuse, il se frotta les mains de contentement. La journée serait belle, très belle. Alors qu’il déposait sa sacoche près de la canne pour y accrocher du fil, son regard fut attiré par un reflet dans l’herbe. Intrigué, il poussa les limbes qui cachaient l’objet de sa curiosité et découvrit un bijou en or massif. L’objet scintillait de mille feux lorsqu’il l’extraya du sol, c’était comme s’il venait d’être perdu. Pourtant, ce ne pouvait être qu’une relique ancienne, personne dans les parages n’avait de tel bijou.

Levant ce qu’il pensait être une broche sculptée en forme de feuille afin de l’observer avec une meilleure lumière, ses paupières se clorent pour le protéger du reflet intense provenant d’un arbre à quelques mètres de lui. Au début, il pensa que le soleil se trouvait juste derrière l’arbre et qu’il avait bêtement regardé dans sa direction, mais quelque chose clochait. L’arbre était tourné vers le nord. Or le soleil venait de l’est le matin. Clignant abondamment des paupières, il s’adapta à la vive luminosité pour découvrir un arbre aux feuilles d’or. Il n’en crut pas ses yeux. C’était impossible ! S’approchant vivement de l’arbre, il attrapa une branche basse et constata que les feuilles d’or étaient reliées au bois de l’arbre. En faisant cela, il effraya un martin-pêcheur qui se cachait là. C’était un peuplier aux petites feuilles de tremble. Reculant en portant une main devant sa bouche, il se laissa tomber à genou et pleura de joie. Il était riche. Il était riche !

Ce soir-là, il rentra en transportant dans sa sacoche trois sublimes truites assez grosses pour nourrir sa famille plusieurs jours et les poches remplies de feuilles en or. Il attendit que le repas soit terminé pour apprendre la nouvelle aux siens. Son père eut les yeux si ronds, qu’ils faillirent sortir de leurs orbites. Sa mère se mit à pleurer toutes les larmes de son corps en osant à peine toucher les feuilles d’or. Sa sœur se mit à crier et danser de joie, embrassant la joue de son frère en lui assurant qu’il était le meilleur grand frère du monde. Après que leurs esprits eurent réalisé leur chance, son père lui demanda immédiatement de le mener, dès le lendemain, à l’arbre d’or. Galaten accepta et son père le prit dans ses bras en l’embrassant comme jamais il ne l’avait fait. Il lui répéta la soirée entière qu’il était fier de lui. Cette nuit-là, Galaten s’endormit les yeux pleins de rêves et le corps couvert de l’amour des siens.

Le lendemain matin, son père l’accompagna avec leur panier à champignon et demanda à Galaten de prendre sa sacoche après l’avoir entièrement vidée. Lorsqu’ils arrivèrent devant l’arbre, le père de Galaten se précipita vers les branches les plus basses et cueillit une seule feuille qu’il éleva dans les airs.

« Cette forêt nous offre la plus belle des récoltes ! s’exclama-t-il. Approche mon fils, nous devons remplir rapidement ce panier. Nous aurons surement le temps de revenir. »

Galaten s’exécuta et ils se remplirent abondamment les poches en plus de leur panier et de leur sacoche. Ils revinrent à deux reprises, cueillant tout ce qui était à leur portée. Pendant que les hommes récoltaient les richesses de la forêt, les femmes s’empressèrent de partir chercher de quoi embellir leur vie. Sa mère emprunta la charrette d’un voisin et partit avec sa fille dans la plus grande ville qu’ils connaissaient, à une demi-journée de voyage. Quand elles revinrent, pleines de victuailles, d’outils neufs et de froufrous, leur voisin se fit suspicieux et fit naître bien des rumeurs.

Leur nouvelle vie permit à Galaten de se rendre plus souvent à la pêche. Il avait tout le temps dont il désirait pour s’amuser à présent. Alors qu’il était assis contre l’arbre d’or, il entendit les branches bruisser et leva le regard. Un Martin-Pêcheur observait les flots où plusieurs truitelles ondulaient paisiblement. En un éclair, il fila vers l’eau et saisit une malchanceuse qui lui servit de repas. Retournant sur l’arbre, il avala sa prise avant de s’ébrouer en regardant la surface de l’eau.

« J’aimerais bien pouvoir faire des prises aussi facilement, lui dit Galaten en surveillant sa canne. »

Il n’attrapa aucun poisson ce jour-là. Avant de partir, il s’approcha de l’arbre et toucha l’une de ses feuilles. Son père et lui n’avaient pris qu’une infime partie de toutes celles qu’il portait. En laissant ses doigts glisser le long de la branche, il effleura un petit bourgeon. Souriant devant la beauté de cet arbre, il lâcha la branche et partit sans prendre la moindre feuille. Il en avait plus qu’assez et l’arbre avait besoin qu’on le laisse tranquille.

Il ne fallut pas longtemps pour que les allées et venues de la famille viennent à attirer la curiosité des villageois. Comment pouvaient-ils se payer autant de choses ? Où trouvaient-ils l’argent nécessaire ? Trop de questions qui poussèrent deux amis à suivre le père et son fils dans leur promenade hebdomadaire. En voyant la raison de leur richesse, les deux amis s’empressèrent d’attendre que Galaten et son père s’en aillent pour faire comme eux. Bien évidemment, la cupidité est une maladie transmissible et bientôt, la richesse nouvelle de quelques-uns fut celle de tout le village. Bien qu’essayant de rester discrets, les villageois finirent par se croiser au pied de l’arbre et un conseil du village fut organisé là.

« Cet arbre a été découvert par mon fils, clama le père de Galaten.

Nous en avons tous conscience, Alfonse, mais les richesses de la forêt appartiennent à tous. Nous devons partager équitablement cet or, décida le chef du village.

Comment savoir ce qui a déjà été pris ? demanda une femme en s’avançant les mains sur les hanches. Il faut décompter ce qui a été malicieusement pris.

Oui ! Ce n’est que justice.

Sans mon fils, vous n’auriez rien ! se défendit Alfonse. Ce n’est que justice, que nous ayons une compensation.

Je suis d’accord avec Alfonse, dit l’un des premiers à s’être servi. 

C’est bien une réflexion de …»

Tandis que les discussions et quelques insultes à peine dissimulées s’éternisaient, Galaten alla s’installer au bord de l’eau. Plusieurs regards le suivirent, suspicieux et jaloux qu’il puisse se servir en douce. Il regardait le reflet de l’arbre dans l’eau, se demandant s’il n’avait pas mal agi en prenant cette première feuille. Perdu dans ses pensées, il ne vit qu’au dernier moment le Martin-Pêcheur passer devant lui pour prendre son repas. Il suivit son envol et le vit se poser sur une branche haute de l’arbre d’or. Que devait penser ce pauvre oiseau, voir autant d’humains au pied de sa maison ? Imaginait-il seulement ce qui pourrait advenir de sa maison ?

« Galaten, l’appela sa mère. Le conseil a pris une décision, tu viens ? »

Galaten se redressa immédiatement et la rejoignit. Le chef du village, entouré de trois autres anciens, demanda le silence avant de parler.

« Après mûre réflexion, nous, Conseil de ce village, avons décidé que les feuilles de cet arbre seraient partagées équitablement entre tous. Les feuilles déjà cueillies ne seront pas comptabilisées, notamment parce que nous n’avons aucun moyen de le faire. Afin d’agir au mieux, chaque famille aura le droit de cueillir des feuilles le premier jour de la semaine. Deux hommes seront mis en poste devant l’entrée afin de s’assurer qu’aucun ne vienne prendre plus que son content. À présent, puisque toutes les familles sont présentes, nous allons procéder à une distribution. »

Sur ces mots, tous se jetèrent sur l’arbre. Les plus grands attrapèrent les branches hautes, les plus agiles y grimpèrent, les plus pressés prirent des scies et récupérèrent des branches entières avant de les effeuiller entièrement. Devant cette frénésie cupide, Galaten eut un pincement au cœur. Il assista impuissant à l’arrachement de la branche qui l’avait tant ému. Le bourgeon n’avait pas encore éclos et ne le ferait jamais. Le Martin-Pêcheur s’envola en jetant un regard noir sur ceux qui s’en prenaient à son arbre. À la fin de la cueillette destructrice, il ne restait plus une seule feuille sur la moitié de l’arbre. Lui qui resplendissait sous la lune, n’était plus qu’un être mutilé. La tête basse, Galaten toucha le tronc de l’arbre et s’excusa. Il n’avait pas voulu ça. En arrivant chez lui, il tenta de dire à son père qu’ils étaient assez riches. Alfonse rit bruyamment en lui ébouriffant les cheveux.

Les semaines suivantes, quand c’était au tour de sa famille d’aller à l’arbre, Galaten en profitait pour pêcher. À chacune de ses visites, l’arbre était de plus en plus décharné. Les rares bourgeons qui éclosaient encore ne donnaient que des feuilles éphémères aussitôt cueillies. L’oiseau était de plus en plus haut perché dans l’arbre, là où les feuilles ne pouvaient être atteintes. Avant de repartir, Galaten posait continuellement sa main sur le tronc en s’excusant. Il s’en voulait atrocement.

Semaine après semaine, l’arbre semblait perdre en vigueur, les branches durcissaient et le lichen prenait de plus en plus de place sur les rameaux morts. Les feuilles perdaient leur éclat et semblaient dépérir. L’automne était arrivé et avec lui, les arbres finissaient de faire leurs réserves. Alors que la forêt se couvrait de rouge et d’or, l’arbre au trésor en faisait de même. L’alerte fut donnée par la famille Trévas. Alors que le plus jeune fils était grimpé bien haut pour atteindre l’inatteignable richesse, il avait décroché plusieurs feuilles sèches comme la paille et sans aucun reflet d’or. Un conseil fut aussitôt organisé au pied de l’arbre et une décision fut prise.

Si les feuilles perdaient leur or, alors il fallait rapidement les récupérer. Les peupliers sont des arbres à rejet, les villageois ne risquaient rien à l’abattre pour obtenir un cépage plus rentable. Cette fois, Galaten s’y opposa.

« Vous êtes fous ? Vous allez le tuer !

Bien sûr que non ! s’exclama en riant le chef du village. Nous allons le faire fructifier pour le printemps prochain.

Vous n’en avez pas besoin, nous avons tous assez d’or pour vivre correctement pendant des siècles.

Nous n’allons pas laisser se perdre autant d’or, s’indigna une femme.

Il repoussera, prenons tant que nous le pouvons encore, dit un homme.

Non ! hurla Galaten. Il est mourant, laissez-le. »

Son père l’attrapa par les oreilles et le tira à l’écart. Il était rouge de colère et le gifla violemment à l’abri des regards.

« Tu es fou ?! Tu veux qu’ils nous retirent notre part ? Il y a encore plein d’or et je ne laisserai pas ce qui me revient de droit être donné à un autre.

Nous avons bien assez ! Tu ne sais même plus quoi faire de toutes ces feuilles d’or que tu entasses partout dans la maison. Nous avons largement de quoi vivre en paix notre vie entière.

Espèce d’imbécile ! le secoua son père. Nous n’en avons jamais assez et si on ne le prend pas ce sont eux qui se rempliront les poches. Alors maintenant, tais-toi ! Je vais prendre notre part et soit heureux que je ne t’en prive pas. »

Alfonse alla rejoindre promptement le reste des villageois au pied de l’arbre, laissant son fils indigne derrière lui. Au bord de la rivière, Galaten assista impuissant à une atrocité sans nom. Les bucherons se mirent au travail, frappant le tronc de leurs haches meurtrières. À chaque coup, le ciel se mit à gronder. À chaque coup, l’eau de la rivière se glaça un peu plus. À chaque coup, les poissons et les oiseaux fuyaient les lieux. À chaque coup, le Martin-Pêcheur sursautait alors qu’il essayait de se cramponner à sa maison. À chaque coup, une larme perlait sur le visage de Galaten.

Quand l’arbre finit par tomber, un bruit assourdissant résonna dans toute la forêt, accompagné par l’acclamation cupide des villageois. Ils se précipitaient sur l’arbre pour le dépouiller de la vie. Le Martin-Pêcheur s’était envolé et tournait en rond autour de cette exécution. En chutant, l’une des feuilles de l’arbre avait été propulsée jusqu’à Galaten où elle vint se déposer dans sa main. Il regarda la feuille d’or qui gardait toute sa splendeur. Soudain, des hurlements parvinrent de la cime de l’arbre. Les villageois se mirent à inspecter l’arbre dans les moindres interstices de son écorce. Leur terrible constat restait le même. Ne comprenant pas la raison de leur désarroi, il alla rejoindre son père qui tenait une poignée de feuille verte.

« Elles sont toutes devenues ainsi ! hurla-t-il de rage. L’or a disparu, l’or a disparu ! »

Galaten vit une détresse sans nom atteindre son père qui était pourtant aussi riche que le plus puissant des rois. Il avait stocké tellement de feuilles que quelques-unes en plus n’auraient rien changé. Il secoua alors son fils en l’intimant à chercher l’or. Il devait en rester et il le voulait. C’était la cohue, les villageois se poussaient, ils s’insultaient et des bagarres éclatèrent pour des morceaux de feuille qui luirent momentanément. Le poing fermé, Galaten s’éloigna de cette scène débilitante de cupidité. Lorsqu’il atteint la rivière, seul loin de l’arbre, il ouvrit la main et vit la feuille d’or, toujours aussi belle. Sans réfléchir un seul instant, il la jeta dans la rivière. En quittant sa main, elle se changea progressivement, et lorsqu’elle atteignit l’eau, elle n’était plus qu’une simple feuille tout ce qu’il y avait de plus normal.

Après ce soir, tout changea. Les stocks faits par les villageois n’étaient plus que des tas de feuilles pourrissantes. Plus aucune trace d’or … Quelques jours plus tard, des marchands vinrent demander des comptes. Il restait encore une feuille d’or, cachée dans une sacoche de pêche. La première que Galaten ait cueillie. Lorsqu’il la découvrit, il ne dit rien. Le printemps revenait et avec lui, les villageois surveillaient les rejets de l’arbre. Malheureusement pour eux, les premières feuilles qui apparurent étaient normales. Un par un, ils finirent par abandonner l’espoir de revoir de l’or. Alors qu’il se savait seul, Galaten retourna auprès de l’arbre, la dernière feuille d’or dans sa sacoche. Il regarda le tronc rongé par les vers et les champignons. Il s’en approcha et chercha un petit trou dans l’écorce pour y dissimuler la feuille. Personne ne s’intéressait plus à ce cadavre pourrissant. Une fois encore, Galaten lui présenta ses excuses, laissant échapper une larme de remord. Tout était de sa faute. Un battement d’ailes attira son regard sur le Martin-Pêcheur qui s’était posé juste devant lui sur le tronc. Dans son bec brillait une pépite d’or qu’il vint déposer dans la paume encore ouverte de Galaten. Puis, il s’envola en décrivant des cercles autour de lui, comme pour lui demander de le suivre. Fourrant la pépite dans sa poche, il suivit l’oiseau à travers les bois. Ce dernier le conduisit jusqu’au coin de pêche où son grand-père l’emmenait toujours. L’oiseau survola l’obstacle bouchant l’entrée de la crevasse et Galaten en fit de même. Prenant son courage à deux mains, il escalada l’amas de bois pourris et de pierres glissantes. Il faillit se casser le cou par trois fois, mais réussit à passer de l’autre côté en tombant sur les fesses. Le Martin-Pêcheur tournait en cercle autour d’un petit trou creusé au bord de la rivière. Alors, Galaten comprit. Il sortit la pépite de sa poche et observa. C’était un graine d’or qu’il tenait en main. Sans hésitation, il l’enfonça dans la terre et la recouvrit. Puis, il alla prendre de l’eau à la rivière pour l’arroser. Tous les jours, il revint, escaladant à ses risques et périls l’amoncellement rocheux, pour prendre soin de l’enfant de l’arbre d’or. Il regarda ses feuilles éblouissantes éclorent sans jamais se servir, sans jamais en avoir ne serait-ce que l’idée. Il fallut du temps, mais à l’abri de la cupidité l’arbre d’or se dressa à nouveau. Depuis ses branches un Martin-Pêcheur veille. Quant à Galaten, il ne quitta jamais la forêt, même après que les villageois aient fui les créanciers en colère. Nombre sont ceux qui viennent le voir pour entendre l’histoire de l’arbre d’or et pour cela ils ne lui doivent rien. Il leur suffit de s’enfoncer dans les bois à la recherche de la maison au Martin-Pêcheur. Sous l’oiseau gravé à même la porte est inscrit : Le Martin-Pêcheur prend seulement ce dont il a besoin et pour lui, la nature offre tout l’or du monde.

Merci de votre confiance

Nous avons bien reçu votre demande.
Nous prendrons en charge votre commande dès réception de votre paiement.